Cahier des charges de la formation des enseignants : abandon de toute ambition professionnalisante

samedi 20 mars 2010


Comment seront formés les futurs enseignants de la petite section de maternelle à la terminale ?

Le ministère va publier à la fin du mois un arrêté définissant le cahier des charges de la formation des enseignants.

Ci-dessous analyse du projet d’arrêté, notamment d’après des éléments du Café pédagogique.

Le texte comprend l’arrêté proprement dit et son annexe qui constitue le cahier des charges de la formation des enseignants.

L’arrêté rappelle que les futurs maîtres seront formés en université et recevront une initiation à la recherche « qui fait partie du bagage du futur professionnel afin de lui donner les moyens d’analyser et de faire évoluer ses pratiques ».

Du déclaratif sans beaucoup d’effets dans le contenu des formations. Par ailleurs, le texte ne prévoit aucun cadrage national des formations.

 Un stage « en responsabilité » facultatif

Deux stages professionnels sont envisagés ( au lieu de l’année complète « en responsabilité » qui prévalait jusque là, rémunérée à plein temps ! ) :

 un stage d’observation et de pratique accompagnée d’une durée ne pouvant excéder 40 jours et dans la limite de 108 heures ;

 un stage en responsabilité « n’excédant pas 108 heures et rémunéré ».

Le stage, de six semaines au cours de l’année de M1, payé 3 000 euros, n’est pas obligatoire, et il n’est pas évident que les épreuves du concours sanctionnent la capacité à témoigner d’une telle expérience.

Luc Cédelle craint que « beaucoup d’étudiants » n’y renoncent et privilégient la préparation de leur master et de leur concours.
"Un premier indice en ce sens vient du fait que ces stages ont déjà été proposés cette année scolaire aux étudiants préparant les concours 2010 : dans l’académie de Reims (…), seulement 348 candidatures ont été formulées pour 1 300 stages proposés. »

Ainsi de nouveaux enseignants pourraient arriver l’année suivante devant une classe sans avoir jamais vu d’élèves...

Source ToutEduc

 10 compétences sans ambition

Le cahier des charges définit les 10 compétences du futur enseignant :

 agir en fonctionnaire de l’État et de façon éthique et responsable ( et ne pas « désobéir » ? ) ;
 maîtriser la langue française pour enseigner et communiquer ;
 maîtriser les disciplines et avoir une bonne culture générale ;
 concevoir et mettre en œuvre son enseignement ;
 organiser le travail de la classe ;
 prendre en compte la diversité des élèves ;
 évaluer les élèves ;
 maîtriser les technologies de l’information et de la communication ;
 travailler en équipe et coopérer avec les parents et les partenaires de l’école ;
 se former et innover.

D’après JL Auduc : « Alors que l’arrêté du 19 décembre 2006 insistait sur la progressivité de l’acquisition de ces dix compétences liées entre elles, le texte mis en concertation comporte le risque d’un émiettement, d’un fractionnement de ces compétences qui peut permettre de justifier, notamment pour les CAPES, l’abandon de toute approche professionnelle dans les concours et la non-obligation des stages ».

 Formation « professionnelle »... après avoir commencé le travail !

"Au cours de la première année d’exercice, les professeurs et CPE stagiaires bénéficient d’actions de formation comprenant un tutorat et d’autres formes d’accompagnement, ainsi qu’un approfondissement ou des compléments de formation portant prioritairement sur l’acquisition des compétences 5, 6, 7, 8 et 9 du référentiel de compétences annexé.

Des formations seront obligatoirement proposées dans les domaines suivants :
 conduite de la classe,
 individualisation de l’enseignement,
 évaluation des élèves
 gestion des situations conflictuelles ou de comportements discriminatoires,
 connaissance de l’environnement institutionnel,
 connaissances relatives aux compétences inscrites dans le référentiel du C2I de niveau 2.

Ces actions de formation seront organisées sous l’autorité du recteur."

Une formation professionnelle, regroupée en fin de formation à un moment où le jeune enseignant est déjà en poste devant les élèves...

D’une part, cela confirme que ce ministère n’a que bien peu de considération pour une compétence professionnelle des enseignants, qui sont vus uniquement comme des « transmetteurs de connaissance ».

Mais aussi, alors que se multiplient les démissions de jeunes collègues écœurés par le boulot et le manque de soutien de l’administration, ces immersions sans aucune préparation vont amplifier le phénomène de façon dramatique.

Le projet d’arrêté