L’entreprise lieu de laïcité

vendredi 14 mai 2010


Le débat actuel sur le port de la burqa amène à s’interroger sur la place de la religion au travail.

Comment la liberté religieuse peut-elle s’exprimer sur le lieu de travail ? Une femme peut-elle porter librement le voile dans son entreprise ?

Ce type de questions est à priori paradoxal quand on le replace dans un établissement privé confessionnel (catholique, juif, musulman...), et qui aurait tendance à privilégier l’expression d’une religion sur toutes les autres, voire de considérer les athées comme « non conformes ».

Le filtre actuel pratiqué illégalement par les responsables de l’enseignement catholique lors des recrutements par le biais de l’« accord collégial » (on y évalue la capacité du postulant à s’inscrire dans le « projet de l’enseignement catholique ») relève de ce type de discrimination.

La loi impose pourtant, dans le cadre du contrat qui lie l’établissement à l’État comme dans le droit du travail, le principe du respect absolu de la liberté de conscience : les écoles confessionnelles sont donc tenues au respect de la laïcité.

La HALDE (Haute Autorité de Lutte contre les Discriminations et pour l’Egalité) a rendu le 6 avril 2009 une délibération sur ce point, rappelant que le principe reste celui de la liberté de religion et de convictions sur le lieu de travail.

Elle précise que l’employeur peut cependant y apporter des restrictions, mais que celles-ci doivent être justifiées par la tâche à accomplir et proportionnées au but recherché (conformément à l’article L. 1121-1 du Code du travail).

 Interdire le port du voile au travail ?

L’employeur peut insérer dans le règlement intérieur une disposition interdisant le port du voile. Mais cette clause doit être strictement justifiée par la nature du poste et des fonctions exercées. Il ne peut prévoir une interdiction générale et absolue.

 La liberté de religion doit ainsi être conciliée avec les intérêts de l’entreprise.

Ainsi, le simple fait d’être au contact de la clientèle ne saurait justifier à lui seul l’interdiction du port du voile. Il faudra prouver le trouble causé à l’entreprise ; par exemple que le port du voile par une vendeuse dans une boutique de mode porte atteinte à « l’image de marque » de l’entreprise (Cour d’appel de Saint-Denis de la Réunion, 9 septembre 1997).

En outre, il appartient à l’employeur de démontrer que l’atteinte portée au droit de manifester sa religion est fondée sur des éléments objectifs étrangers à toute discrimination (Cour d’appel de Paris, 19 juin 2003).

En invoquant leurs convictions religieuses, les salariés ne peuvent par ailleurs se soustraire à des règles de droit du travail.

 Quelles sont les restrictions possibles à la liberté religieuse ?

L’employeur peut sanctionner les actes de prosélytisme pouvant porter atteinte à la bonne marche de l’entreprise.

Une restriction à la liberté de religion peut encore être apportée en considération d’impératifs de sécurité, de santé ou d’hygiène sanitaire (article L. 4122-1 du Code du travail).

Source : Juritravail