Pourquoi le SMIC horaire n’augmentera que de 4 centimes au 1er janvier 2010

samedi 12 décembre 2009


Sur proposition d’un « groupe d’experts », voix autorisée du gouvernement, le SMIC horaire brut augmentera au 1er janvier de 8,82 € à... 8,86 €.

Or le SMIC est la référence, d’ailleurs croissante, pour beaucoup de salariés de l’enseignement privé sous contrat :

  • les salariés de droit privé du bas des échelles des catégories 1, 2 et 3 ;
  • les suppléants (13% des enseignants en 1er degré), qui sont même condamnés à y rester puisqu’il n’y a aucune espèce de promotion possible (nous avons revendiqué il y a deux ans la mise en place d’une grille permettant une progression : refusé car pas le budget... ) ;
  • les délégués académiques (DA : 20% des profs en 2nd degré), et l’ensemble des MA en début d’échelle.

Les motifs invoqués par le « groupe d’experts » sont scandaleusement cyniques, jugez vous-même !

 Les conclusions du « groupe d’experts »

Le groupe d’experts chargé de faire des propositions sur le taux de la revalorisation annuelle du SMIC vient de rendre son avis.

Il recommande que la revalorisation du SMIC qui prendra effet au 1er janvier 2010, corresponde à « la stricte application des mécanismes légaux », c’est-à-dire sans « coup de pouce » de l’État, soit de 0,5%.

Le Smic mensuel passera ainsi à 1.343,77 euros bruts par mois (environ 1.056,24 euros nets) pour 35 heures hebdomadaires. Actuellement, il est fixé depuis le 1er juillet 2009 à 1.337,10 euros bruts, soit 1.051 euros nets environ (gain de 5 €, c’est royal !).

Pour justifier sa position, le groupe d’expert avance plusieurs arguments :

  • il s’agira de la seconde revalorisation en 6 mois (la dernière ayant eu lieu le 1er juillet dernier), alors même que la France se trouve toujours en période de crise ;
  • la proportion de salariés directement concernée par la revalorisation annuelle du SMIC a sensiblement baissé. « La vigueur de la négociation collective de branche et de moindres relèvements du SMIC au cours des trois dernières années ont permis d’atténuer l’emprise du salaire minimum sur le bas de la distribution des salaires », peut-on lire dans l’avis ;
  • « l’insuffisance du nombre d’heures travaillées » constitue en France « le premier facteur de pauvreté au travail avant la faiblesse du salaire horaire ». Dans ces conditions, "la politique du SMIC ne peut constituer un moyen efficace de lutte contre la pauvreté.
  • les transferts comme la Prime pour l’emploi (PPE), puis le Revenu de solidarité active (RSA, ancien RMI), ont contribué à soutenir considérablement au cours des dix dernières années le revenu disponible des ménages situés en bas de l’échelle des salaires, notamment de salariés susceptibles de travailler à temps partiel au SMIC horaire".

 Le commentaire du SUNDEP-Solidaires

Bien sûr cet argumentaire nous scandalise en ce sens qu’il justifie la faiblesse des basses rémunération en France (pour les hautes aucun de ces « groupes d’experts » ne propose de limitation).

Il est aussi à rapprocher d’un rapport « Les classes moyennes sous pression », de Régis Bigot (Credoc), qui montre qu’un salaire de 1 500 € par mois ne laisse comme marge réelle à son « bénéficiaire » que 300 € pour ses loisirs, pour ses vacances, pour s’habiller ou équiper son foyer, après avoir payé les dépenses contraintes (logement, eau, gaz, etc.) et ces dépenses incontournables que sont les frais d’alimentation, de transport, de santé et d’éducation.

Et les 10% les plus pauvres de la population n’ont eux en moyenne que 80 € de marge.

Par ailleurs, une étude de la DARES montre que :
 26,5 % des salariés des entreprises de moins de 10 salariés sont concernés par le SMIC, soit 760 000 personnes (9,8 % dans les entreprises de 20 à 49 salariés, 3,9 % dans celles de 500 salariés et plus).

 23 % des salariés à temps partiel contre 8 % des salariés à temps complet.

 Le SMIC concerne 40,5 % des salariés des TPE qui travaillent à temps partiel, c’est à dire toute cette population dont l’emploi s’est précarisé ces dernières années, où sont sur-représentées les femmes, les jeunes, les beurs et les noirs…

Enfin, l’INSEE publie une intéressante étude sur la perception qu’ont les salariés de leur propre rémunération :

  • dans les entreprises de plus de 10 salariés du secteur marchand, 55 % des salariés se déclarent plutôt insatisfaits de leur salaire en lui attribuant une note inférieure ou égale à 5 sur 10 ;
  • seuls 28 % expriment une satisfaction quant à la rémunération de leur expérience professionnelle et 46% quant à la rémunération de leur niveau d’études ;
     pour la moitié des salariés l’écart entre salaire perçu et salaire jugé « normal » est de
    plus de 330 euros mensuels.

Après tout, les salariés sont de plus en plus sollicités pour s’auto-évaluer (en espérant qu’ils se déprécient, fonds judéo-chrétien oblige !). Il est plus que normal qu’ils jugent aussi leur niveau de rémunération.

Source : d’après Net-iris, CREDOC, DARES, INSEE