Violences scolaires : une com’ ministérielle qui fait le jeu de l’extrême droite ?

samedi 7 mai 2011


Le thème de la violence scolaire utilisé à des fins électoralistes, populistes et démagogiques ?
De plus en plus de professionnels l’expriment, journalistes, chercheurs, médecins, magistrats, enseignants... La presse nationale se montre encore bien timide pour s’en faire l’écho.

Signalons également que voilà bien une « publicité gratuite » en pleine période d’inscriptions, pour le privé sous contrat !
De plus, des sites catholiques proches des traditionalistes, comme Chrétienté Info, font aussi de la publicité pour le projet de décret gouvernemental .

Pour autant, il ne s’agit pas de nier un problème, mais bien de le mettre en perspective en dehors de tout discours populiste.

A propos de l’organisation les 2 et 3 mai 2011 d’assises nationales du harcèlement à l’école, le Professeur Hubert Montagner, ancien Directeur de l’Unité Enfance inadaptée de l’Institut national de la santé et de la recherche médicale (INSERM), déclare [1] :
« On ne s’y prendrait pas autrement si on voulait détourner l’attention de l’opinion publique de la situation réelle de l’école et des écoliers.
On ne s’y prendrait pas autrement si on voulait occulter les conséquences désastreuses des mesures imposées par le ministère de l’Éducation nationale depuis trois ans (réduction du nombre de postes d’enseignants, extinction à terme des Réseaux d’aides spécialisées aux élèves en difficulté (RASED), fermetures de classes, regroupement d’écoles, augmentation de l’effectif d’enfants par classe, pseudo-évaluations discriminantes, cursus de formation des enseignants « insensé », « rythmes scolaires » aberrants, alourdissement des journées scolaires avec le poids augmenté des apprentissages dits fondamentaux, aide personnalisée aux enfants en difficulté scolaire à des moments de moindre réceptivité et disponibilité...).[...]
La création d’un conseil scientifique sur le harcèlement à l’école (...) et l’organisation les 2 et 3 mai 2011 d’assises nationales du harcèlement à l’école, sont des « arbres sécuritaires » qui masquent la forêt des problèmes des enfants, des familles, des enseignants, de l’école et de la société elle-même. »

Le discours sécuritaire voulu au plus haut niveau a eu pour effet, depuis 2007, de renforcer l’extrême droite [2].
Maintenant l’éducation est semble-t-il devenue domaine de prédilection pour développer ce discours sécuritaire. Faire de l’école, par des généralisations abusives et en tous lieux, une zone de haute insécurité est l’occasion d’une nouvelle table ronde pour le chef de l’État [3].
D’ailleurs le ministre Luc Chatel, comme le relate Rue89, va jusqu’à trahir un récent rapport de l’Observatoire international de la violence à l’école pour le compte de l’Unicef. qui, sans faire l’impasse sur les faits de violence avérés, met en avant la satisfaction des élèves et des parents face à l’école [4].

A nouveau, les risques sont encore un renforcement de l’extrême droite et des mouvements qui en sont proches ! Tend à le démontrer, par exemple, l’aplomb avec lequel l’association SOS Education fait actuellement campagne pour dénoncer la violence scolaire présentée comme un phénomène généralisé :
Comme le signale Touteduc [5], SOS Education n’hésite pas en effet à mettre en ligne un projet de décret « prêt à l’emploi » que le ministre n’aurait plus qu’à signer tel quel, décret qui est présenté exactement « comme il pourrait l’être s’il était publié au Journal officiel, ce qui donne à penser qu’il a été rédigé par les services du ministère. Le style en est d’ailleurs parfaitement imité ! » [6]

Et de fait, certains députés s’y sont semble-t-il laissés prendre, tel le député UMP de Haute-Saône qui a demandé à Luc Chatel la date de parution du texte au Journal Officiel !... [7]

Les manipulations de l’opinion publique et des parlementaires ont encore de beaux jours devant elles...

Merci au Mammouth déchainé


[4 http://www.rue89.com/2011/04/04/vio...

On est loin de l’image souvent véhiculée dans les médias d’une école qui, du fait de violences généralisées, ne serait plus que l’ombre d’une école ; le rapport souligne qu’il est « en tout cas périlleux de parler d’un effondrement de l’école élémentaire quand sont affirmés aussi fortement le bien-être de près de neuf élèves sur dix et la qualité de leurs relations aux enseignants. » Le rapport n’ignore pas pour autant les violences dont se plaignent 11% des écoliers, mais privilégie des mesures de prévention à long terme et une politique qui ne soit pas « soumise à un calendrier électoral. », préconisations qui semblent peu compatibles avec les effets d’annonce actuels du ministère...

Cela dit, les objections formulées par Hubert Montagner à propos de ce rapport font peser un sérieux doute sur quelques-unes de ses conclusions : certains éléments de l’étude (en particulier le phénomène du harcèlement) mériteraient sans doute d’être mieux établis et définis au point de vue scientifique pour emporter pleinement l’adhésion, d’autant que l’analyse des conduites violentes (qui ne sauraient évidemment toutes relever du harcèlement),, ne peut être conduite uniquement dans le milieu scolaire.

http://blogs.mediapart.fr/edition/l... 

[6Le texte du « décret » peut être consulté en ligne ici : http://soseducation.files.wordpress.... Il est à noter que des sites catholiques proches des traditionalistes, comme Chrétienté Info, font aussi de la publicité pour ce « décret ».

[7Le texte de la question écrite du député UMP Michel Raison peut être consulté ici : http://questions.assemblee-national...
Le député souhaite la mise en place de « sanctions automatiques », ce qui selon lui « rassurerait les professeurs et les parents d’élèves ».