Enseignement privé : financements et lobbys

lundi 14 février 2011


Le financement de l’enseignement privé sous contrat se fait :

 par le financement public (7 milliards d’euros sur 10 annonce le secrétaire général de l’enseignement catholique)

 par le financement privé (3 milliards pour l’enseignement catholique) , enfin pas toujours tout à fait privé ! (voir 2-2)

 1- Le financement public et les lobbys

 1-1- En quoi consiste le financement public ?

EtatCollectivités territoriales
le salaire des enseignants sous contrat et les charges patronales afférentes a) le forfait d’externat payé par le Conseil régional pour chaque lycéen et étudiant, par le Conseil Général pour chaque collégien, par la commune pour chaque élève de l’école maternelle et élémentaire : ce forfait d’externat est réévalué chaque année (voir en PJ) ; il sert à payer le personnel salarié de droit privé qui travaille dans les établissements (personnel d’éducation, administratif, de service et d’entretien).

b) les subventions d’investissement et d’équipement

a) le forfait d’externat : l’État (donc la collectivité) finance la scolarité de chaque élève de l’enseignement privé sous contrat

b) Chaque collectivité territoriale décide de subventionner ou non les investissements immobiliers et les équipements, et si oui, dans quelle proportions .

Actuellement la loi Falloux limite ces subventions à 10% du budget établissement (hors subventionnement de l’État) pour les établissements généraux, écoles, collèges, lycées d’enseignement général .
Pour les établissements professionnels, technologiques et agricoles, la loi Astier permet un subventionnement sans limitation.

Le secrétaire général de l’enseignement catholique estime le financement public insuffisant tant pour les équipements que pour les investissements immobiliers et estime le besoin supplémentaire de 250 millions d’euros en priorité pour les écoles …
Quand l’enseignement catholique réclame des investissements immobiliers, il ne dit pas un mot du patrimoine immobilier encore plus faramineux qu’il veut garder de droit privé, mais entretenu et rénové par l’État  !!

Pour les seuls collèges et Lycées relevant de la loi Falloux, les Conseils académiques de l’Éducation Nationale, siégeant en formation contentieuse et disciplinaire, sont consultés par les recteurs : l’avis étant purement consultatif, on a vu des conseils généraux verser des subventions malgré l’avis négatif du Conseil .

Il n’y a pas en général de suivi systématique ni de vérification systématique de l’utilisation de ces subventions et de leur cadre.

 1-2 Les lobbys

Ce sont (sans que la liste soit exhaustive) :

a) les fondations reconnues d’utilité publique comme la « Fondation pour l’École », ou encore la « Fondation Saint-Matthieu pour l’École catholique ».

  • La Fondation pour l’École finance l’enseignement privé hors contrat
    La « Fondation pour l’école », créée en 2007 par Anne Coffinier, a eu la reconnaissance d’utilité publique dès mars 2008 : or cette fondation soutient les écoles privées hors contrat, souvent intégristes (comme celles de la Fraternité Saint Pie X) toujours « ultra-cathos » ou « cathos ultra » ;
  • La fondation Saint-Matthieu finance l’enseignement privé sous contrat
    La fondation créée en 2010, bénéficie d’une « déclaration d’utilité publique » bien avant les 3 années de pratique associative nécessaire. Elle vise à « recueillir 1 milliard d’euros en 10 ans », donc entre 600 et 750 millions de défiscalisation. Cette fondation est coprésidée par Claude Bébéar, ancien patron d’AXA, souvent cité comme proche de l’Opus Dei, dans la revue Golias en particulier.

Reconnues donc « d’utilité publique », les fondations permettent de bénéficier de dons défiscalisés ; cette reconnaissance d’utilité publique permet aussi de conférer une légitimité particulière à ces organisations, ce qui est bien utile lorsque celles-ci souhaitent se spécialiser dans la levée de fonds : c’est ainsi que depuis sa déclaration d’utilité publique, la Fondation pour l’école explique que ce statut représente pour elle « l’outil le plus performant pour lever des fonds dans des conditions fiscalement avantageuses »

Ce sont donc les citoyens qui financent par l’impôt ces fondations et les établissements qu’elles soutiennent financièrement.
_C’est un moyen grossier (mais encouragé par le gouvernement ?) de contourner la loi Falloux : de fait, cette défiscalisation constitue une subvention publique dérogeant à l’interdiction totale de dépassement du seuil des 10% fixé par la loi.

b) les associations qui mettent tout en œuvre pour obtenir ce statut de reconnaissance d’utilité publique .
Citons par exemple C’est le cas par exemple de l’ASFP, l’association pour la Fondation de Service politique, et sa revue Liberté politique (et du site du même nom) : ceux-ci s’étaient par exemple déjà fait remarquer ces dernières années en réclamant l’annulation du bac 2005 au motif qu’un des sujets invitait les candidats à fournir un travail de réflexion et d’analyse sur un article du Monde relatif à l’IVG, 30 ans seulement après la promulgation de la loi Veil... Inacceptable pour l’ASFP !

c) Les lobbys auprès des parlementaires :
 D’abord la très puissante iFRAP (fondation reconnue d’utilité publique en 2009 ) think-tank ultralibéral spécialisé dans le lobbying auprès des parlementaires .
En matière scolaire, cette fondation (qui n’est certes pas spécialisée dans ce domaine, mais n’en a pas moins des idées très arrêtées et fort proches de celles de l’association SOS Education ou de la Fondation pour l’école) milite pour une sorte de libre marché éducatif avec la mise en place, pour chaque élève, d’un chèque éducation remis aux familles pour qu’elles choisissent ... public, privé sous et hors contrat ...
 comme cela ne suffisait sans doute pas (?!) : le Bureau de l’Assemblée Nationale crée un groupe d’études sur l’enseignement privé sous contrat et hors contrat" (voir document joint)

 2- Quid du financement réellement privé ?

Ce sont les dons non défiscalisés (ils sont souvent placés dans cette partie mais nous avons choisi de les mettre dans la partie « financement public » et les frais payés par les familles .
C’est, selon même le Secrétaire Général de l’enseignement catholique, même pas 1/3 du financement de fonctionnement total pour le privé sous contrat (et encore doit-il inclure ce que nous appelons financement public par le biais de l’impôt )

 3- Quel profit pour qui ?

Ce ne sont pas les salaires des personnels de droit privé qui témoignent d’une grande reconnaissance de leur travail ... et la réforme qui annihile la notion de métier et enterre définitivement le « à travail égal salaire égal » n’est pas faite pour reconnaître le travail effectif réalisé ...
Alors qui ? les profits sont sur deux plans :
 l’enrichissement du patrimoine immobilier des diocèses, congrégations et institutions privées
 l’influence sur la vie de la société via les lobbys infiltrés dans les cercles de l’argent et du pouvoir pour un conservatisme social et un intégrisme religieux .