Loi d’août 2004 : extension de la liste des dépenses finançables par les communes
L’Association des Directeurs de l’Education des Villes de France (ANDEV) a montré que le texte « redéfinit complètement en les alourdissant fortement la nature des dépenses de fonctionnement obligatoire à prendre en compte dans la contribution communale aux écoles privées ».
« La liste des dépenses est ainsi beaucoup plus extensive que celle de la circulaire du 13 Mars 1985 qui fait actuellement référence ».
Vingt et un contentieux opposent actuellement les organismes de gestion des établissements catholiques (OGEC) aux communes.
A Lille par exemple, la ville verse 494,50 euros par élève, le montant que coûte, selon elle, un élève dans une école publique. L’enseignement catholique a réclamé le double devant le tribunal administratif, estimant qu’un élève coûte au minimum 800 euros. Sur les neuf années du litige (1997 à 2006), l’enjeu s’élève à 12 millions d’euros.
Dépenses obligatoires
Elles sont constituées des dépenses de fonctionnement d’une classe sous contrat d’association à la charge de la commune ou de l’EPCI (établissements publics de coopération intercommunale).
La contribution communale comprend :
– l’entretien des locaux liés aux activités d’enseignement, ce qui inclut outre la classe et ses accessoires, les aires de récréation, les locaux sportifs, culturels ou administratifs… ;
– l’ensemble des dépenses de fonctionnement des locaux désignés ci-dessus telles que chauffage, eau, électricité, nettoyage, produits d’entretien ménager, fournitures de petit équipement, autres matières et fournitures, fournitures pour l’entretien des bâtiments, contrats de maintenance, assurances… ;
– l’entretien et, s’il y a lieu, le remplacement du mobilier scolaire et du matériel collectif d’enseignement ;
– la location et la maintenance de matériels informatiques pédagogiques ainsi que les frais de connexion et d’utilisation de réseaux afférents ;
– les dépenses de contrôle technique réglementaire ;
– les fournitures scolaires, les dépenses pédagogiques et administratives nécessaires au fonctionnement ;
– la rémunération des agents territoriaux de service des écoles maternelles ;
– la rémunération des intervenants extérieurs, recrutés par la commune, chargés d’assister les enseignants pendant les heures d’enseignement prévues dans les programmes officiels de l’éducation nationale ;
– la quote-part des services généraux de l’administration communale ou intercommunale nécessaire au fonctionnement des écoles publiques ;
– le coût des transports pour emmener les élèves de leur école aux différents sites pour les activités scolaires (piscine, gymnase, …) ainsi que le coût d’utilisation de ces équipements ;
La participation aux dépenses pour les activités extra-scolaires est facultative : elle ne peut pas être réclamée aux communes qui ne les finance pas pour leurs écoles publiques.
Les dépenses d’investissement ne sont pas prises en compte.
Les dépenses de fonctionnement des classes sous contrat simple peuvent éventuellement être prises en charge par les communes, dans des conditions fixées par convention passée entre la commune et l’école privée.
Cette contribution « ne peut en aucun cas être proportionnellement supérieure aux avantages consentis par la commune à ses écoles publiques ».
Contribution communale pour les enfants scolarisés dans une école privée d’une autre commune
« La contribution de la commune de résidence pour un élève scolarisé dans une autre commune dans une classe élémentaire d’un établissement privé du premier degré sous contrat d’association constitue une dépense obligatoire lorsque cette contribution aurait également été due si cet élève avait été scolarisé dans une des écoles publiques de la commune d’accueil » fixe le Parlement.
En conséquence, cette contribution revêt le caractère d’une dépense obligatoire lorsque la commune de résidence ou, dans des conditions fixées par décret, le regroupement pédagogique intercommunal auquel elle participe ne dispose pas des capacités d’accueil nécessaires à la scolarisation de l’élève concerné dans son école publique ou lorsque la fréquentation par celui-ci d’une école située sur le territoire d’une autre commune que celle où il est réputé résider trouve son origine dans des contraintes liées :
1° Aux obligations professionnelles des parents, lorsqu’ils résident dans une commune qui n’assure pas directement ou indirectement la restauration et la garde des enfants ;
2° À l’inscription d’un frère ou d’une sœur dans un établissement scolaire de la même commune ;
3° À des raisons médicales"
Cette loi impose aux mairies de financer les écoles privées d’autres communes si leurs résidents ont choisi d’y scolariser leurs enfants :
– si des parents montrent que « la capacité d’accueil » de leur commune de résidence est insuffisante,
– en cas « d’obligation professionnelle »,
– pour « des raisons médicales »,
– ou si un frère ou une sœur est déjà scolarisé dans cette autre commune.
Contrairement à ce qui se passe pour le public, le maire n’est pas autorisé à mettre son droit de veto à cette scolarisation. En effet, pour l’école publique, un accord préalable est nécessaire entre les deux communes, ici le maire sera mis devant le fait accompli.
Selon la FNOGEC (fédération nationale des OGEC), entre 40 à 50% des élèves du privé fréquentent une école implantée dans une autre commune que la leur (5.401 écoles privées sur l’ensemble du territoire et autant de communes).
On voit bien l’ampleur des transferts qui risquent de s’opérer, au détriment des communes rurales et de banlieue.
L’évolution vers le « chèque éducation » ?
Eddy Khaldi, coauteur du livre « Main basse sur l’école publique » (Démopolis), dénonce une forme de « chèque éducation », propre à faire primer les « choix particularistes sur l’intérêt général », comme aux États-Unis.
« Nous ne sommes plus dans un contrat de financement entre la commune et l’école mais entre l’élève et l’école qui nous rapproche du chèque-éducation que souhaitaient les libéraux. »
Par ailleurs, à droite comme à gauche, des élus redoutent un exode scolaire des petites communes rurales et de celles de banlieue vers des écoles privées de centre ville.
L’exode du public vers le privé était jusqu’ici contenu par la sectorisation et la carte scolaire. Depuis son assouplissement, toutes les vannes sont ouvertes.
Pierre Cardo, député UMP et ancien maire de banlieue, n’a pas caché son inquiétude lors de la discussion générale sur la loi Carle : "J’ai passé vingt-six ans à lutter contre l’évasion scolaire.
Dans ma circonscription, les deux collèges dont la capacité d’accueil est de 1 000 élèves n’en reçoivent plus que 400."
« La moindre des choses était que le maire puisse donner son avis », a-t-il regretté. Il souligne qu’« à partir du moment où l’aîné d’une fratrie sera scolarisé dans un collège ou un lycée d’une ville voisine, cela autorisera à scolariser les frères et sœurs dans le privé de la même ville ».